L’excellence de la recherche académique aux États-Unis se fissure

Depuis son retour au pouvoir le 20 janvier 2025, Donald Trump a renforcé sa politique hostile à l’égard de plusieurs institutions académiques américaines. Les universités, longtemps perçues comme des bastions de pensée critique, d’innovation et de diversité, sont désormais dans la ligne de mire de son administration. Résultat : des coupes budgétaires massives et ciblées, une pression politique accrue, et une incertitude grandissante dans le monde de la recherche: la recherche académique aux États-Unis se fissure.
Parmi les premières touchées : des établissements prestigieux comme Harvard, Columbia, ou encore Princeton, qui se sont vus retirer ou geler des financements fédéraux sous prétexte de non-conformité à certaines directives gouvernementales. Ces mesures concernent notamment les programmes de diversité, les libertés étudiantes, ou encore des champs de recherche jugés “idéologiques”. À titre d’exemple, Harvard a vu plus de 2,2 milliards de dollars de subventions fédérales suspendus, affectant directement de nombreux projets de recherche. 1;2.
Au-delà de ces cas emblématiques, ce sont aussi les agences nationales de recherche comme la National Science Foundation (NSF) ou les National Institutes of Health (NIH) qui ont vu leurs budgets revus à la baisse. Les premières victimes de ces coupes sont les recherches en climatologie, en santé publique, ou encore en sciences sociales – autant de domaines considérés comme sensibles ou politiquement « déviants » par la nouvelle administration. 3;4.
Face à cette mise sous pression du monde académique américain, plusieurs pays et universités à travers le monde ont réagi en offrant un refuge aux chercheurs menacés, une réponse à la fois solidaire et stratégique. Mais cette situation interroge aussi, plus largement, sur la place de la recherche dans nos sociétés et sur les parcours qui y mènent, notamment pour les étudiants d’aujourd’hui, qui seront peut-être les chercheurs de demain.
Des universités européennes ouvrent leurs portes
Dans ce contexte où la liberté de recherche est mise à mal outre-Atlantique, plusieurs universités européennes ont choisi de réagir.
En France, vous le savez peut-être déjà, certaines universités et organismes publics comme le CNRS ou l’INSERM ont mis en place des dispositifs facilitant l’intégration de chercheurs étrangers dont la situation professionnelle est devenue précaire dans leur pays d’origine. Ces initiatives devraient permettre à ces scientifiques de poursuivre leurs travaux dans un cadre plus stable, tout en renforçant les échanges internationaux.
En Espagne, des établissements comme l’Université de Barcelone (UB) ou l’Université autonome de Madrid (UAM) ont eux aussi lancé des projets d’accueil spécifiques à destination des chercheurs américains contraints de quitter leur poste. Ils sont soutenus par les autorités avec la mise en place de programmes comme Catalonia Talent Bridge, le Programa ATRAE, ou le Programa Madrileño para la Ciencia en Libertad (PMCL)…. Ces programmes, parfois accompagnés de financements européens, témoignent d’une volonté de faire de l’Europe un espace de refuge pour la science, mais aussi un pôle d’excellence capable d’attirer les talents internationaux. 5;6;7.
Au-delà de l’accueil ponctuel, cette dynamique souligne un enjeu plus large : celui de la coopération académique mondiale et du rôle que l’Europe peut jouer dans la construction d’une recherche indépendante, libre et ouverte sur les grands défis contemporains.
La France et l’Espagne ne sont pas des cas isolés. L’Allemagne, les Pays-Bas, la Suède, ou encore le Danemark ont également mis en place des politiques d’accueil ou de soutien à la recherche internationale, notamment en direction des chercheurs venus des États-Unis. Certaines universités nordiques vont jusqu’à proposer des bourses spécifiques ou des contrats temporaires pour permettre à ces scientifiques de retrouver un cadre de travail serein. C’est aussi une énorme opportunité pour les université et les entreprises européennes de rattraper leur retard face à la recherche aux états-unis mais également en Chine.
Au-delà de cette actualité politique et géopolitique, un autre niveau de réflexion s’ouvre, plus proche du quotidien des jeunes. Car cette situation nous interroge sur la place de la recherche dans nos sociétés, mais aussi sur la manière dont les étudiants d’aujourd’hui peuvent s’y projeter. En d’autres termes : comment devient-on chercheur ou chercheuse ? Et pourquoi ce chemin, parfois inattendu, reste accessible, même si l’on n’a pas encore de réponse toute faite.
La recherche, un monde ouvert à portée de main
La recherche est au cœur de la création de valeur et de richesses. Elle constitue une véritable opportunité pour de nombreux pays de reprendre la main, d’investir autrement, et de repenser leur manière de soutenir l’innovation et la production de savoirs. Mais une chose est certaine : la recherche ne se fera pas sans femmes et sans hommes pour la porter.
Quand on évoque les chercheurs déplacés, les laboratoires internationaux ou les post-docs à l’étranger, on imagine souvent un monde à part, réservé à une élite. Pourtant, ce monde est souvent plus proche qu’il n’y paraît. En réalité, devenir chercheur ou chercheuse ne suppose pas un plan de carrière tracé dès le lycée, ni des parcours d’excellence inaccessibles. C’est un chemin qui se découvre progressivement, au fil des études, des rencontres ou des lectures.

Les systèmes d’enseignement supérieur, qu’il s’agisse du LMD en France (Licence – Master – Doctorat), du BMD dans les pays anglo-saxons (Bachelor – Master – Doctorate), ou du GMD en Espagne (Grado – Máster – Doctorado), sont justement conçus pour permettre cette montée en compétence étape par étape. On entre à l’université sans avoir à tout savoir d’avance. On apprend, on explore, on affine ses envies. Et parfois, au détour d’un mémoire, d’un projet ou d’un stage, l’envie d’aller plus loin apparaît. C’est à ce moment-là que la recherche devient une possibilité réelle, et non plus un simple rêve inaccessible.
Contrairement à ce que l’on imagine parfois, le doctorat n’est pas réservé à ceux qui savent depuis toujours qu’ils veulent “faire de la recherche”. Beaucoup d’étudiants prennent cette décision seulement au cours de leur Master, voire même après, lors d’une première expérience professionnelle ou d’un contrat de recherche. C’est un chemin qui se construit avec le temps, en fonction de ses intérêts, de ses rencontres, et du plaisir qu’on prend à approfondir un sujet !
Ce qu’il faut absolument éviter, c’est de se mettre des barrières trop tôt. Se dire « ce n’est pas pour moi », « je ne suis pas assez bon », ou « je n’ai pas le profil », alors que le système universitaire est justement fait pour accompagner ce type d’évolution. Un établissement universitaire permet d’avancer étape par étape, sans avoir à décider tout de suite de son avenir. Et si un jour l’envie de faire une thèse émerge, le cadre sera là pour la rendre possible.
Lorsqu’on se pose des questions sur son avenir, il est souvent difficile de savoir par où commencer. Est-ce que je suis fait pour des études longues ou plutôt pour des métiers théoriques ou appliqués ? Si vous voulez éviter de vous perdre ou de “tâtonner” trop longtemps, les tests d’orientation peuvent offrir des pistes utiles.
L’un des outils les plus connus et avancés dans ce domaine est le test RIASEC, qui classe les profils en six grands types : Réaliste, Investigateur, Artistique, Social, Entreprenant et Conventionnel. Le profil « Investigateur », en particulier, correspond aux personnes attirées par la compréhension, l’analyse, la résolution de problèmes complexes, la logique, les concepts abstraits: autant de qualités qu’on retrouve souvent chez celles et ceux qui s’épanouissent dans la recherche.
Faire ce type de test ne donne pas une réponse définitive, mais cela permet d’ouvrir des pistes, de prendre conscience de ses forces naturelles, et parfois de mettre des mots sur une curiosité ou une manière de penser qu’on n’avait jamais formalisée. Pour certains, cela peut aussi être un point de départ pour aller explorer davantage une discipline, un domaine, ou simplement mieux se connaître avant de choisir une voie.
Chercheurs sans frontières
Les chercheurs déjà accueillis en France, en Espagne, en Allemagne ou encore dans les pays scandinaves le prouvent chaque jour : la recherche ne connaît pas de frontières. Lorsque des libertés scientifiques sont menacées dans un pays, d’autres ouvrent les portes de leurs laboratoires à ceux qui veulent continuer à chercher, à comprendre, à inventer.
Aujourd’hui, faire de la recherche, c’est souvent voyager, participer à des projets internationaux, faire avancer la science à travers des collaborations entre plusieurs continents, publier et apprendre constamment. Le doctorat est un diplôme reconnu mondialement, un véritable passeport pour une carrière intellectuellement riche, stimulante et souvent internationale. Les universités espagnoles, françaises, allemandes ou encore scandinaves multiplient les échanges, les post-docs, les appels à projets ouverts aux jeunes chercheurs étrangers. Bref, le monde de la recherche, en plus d’être passionnant, est beaucoup plus mobile qu’on ne le pense.
Alors ne vous mettez pas de limites trop tôt, garder à l’esprit que l’orientation n’est pas une ligne droite. Si la recherche vous attire, laissez-vous le temps d’y penser. Curiosité, persévérance et ouverture : ce sont là les vraies qualités pour un futur chercheur ou une future chercheuse. Et qui sait ? Peut-être que vous aussi, un jour, vous ferez partie de ces chercheurs qui font avancer le monde… depuis Paris, Barcelone, Cambridge Boston ou ailleurs.
- Business Insider, Lloyd Lee et Katherine Li, 2025 « The Trump administration is battling higher education » 2 avril ↩︎
- Washington Post, Susan Svrluga et Danielle Douglas-Gabriel, « Harvard sues the Trump administration in escalating confrontation » 21 avril ↩︎
- Science, Meredith Wadman, 2025 , « Trump proposes massive NIH budget cut and reorganization » 17 avril ↩︎
- NBC News, Evan Bush, Aria Bendix et Denise Chow, 2025, « Science under siege: Trump cuts threaten to undermine decades of research » 18 février ↩︎
- El Periódico, Valentina Raffio, 2025, « España invertirá 135 millones de euros en tres años para atraer a científicos punteros de todo el mundo » 8 avril ↩︎
- El Periódico, Montse Baraza, 2025, « Catalunya ofrecerá 78 plazas para científicos de máximo nivel de EEUU con un presupuesto de 30 millones de euros » 31 mars ↩︎
- El Diario de Madrid, 2025, « Un programa para acoger a científicos perseguidos por políticas de Trump, la nueva propuesta de Más Madrid » 6 avril ↩︎